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En 1958, cela fait déjà plusieurs années que Bernard Herrmann travaille aux côtés d’Alfred Hitchcock et, s’il a déjà été amené à composer plusieurs bandes sonores pour le « maître du suspense », ce n’est qu’avec la bande originale de Vertigo (Sueurs froides) que les deux hommes vont atteindre une véritable osmose musicalo-scénaristique.

Une histoire de dédoublement de personnalité, de maladie mystérieuse, et surtout d’amour fou : un scénario idéal pour élaborer la bande originale de Vertigo. Hitchcock connaissait peu la musique et ne donnait, par conséquence, que peu d’instructions à ses musiciens. Ce qui laissa un large champ d’expérimentation et de création pour chacun de ses compositeurs. Herrmann fut le premier à le comprendre et saisit cette occasion pour assouvir ses désirs de créateur.


musique vertigo

Rappelons que Herrmann, à bien des égards, se distingue des compositeurs de musique de film de l’époque. La place du silence ou plutôt le non recours systématique à la musique pour ponctuer certaines scènes.

musique vertigo
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Les codes veulent que les scènes riches en émotion soit proportionnellement instrumentées en fonction de leur degré d’émotion suggérée, qu’il y ait des dialogues ou non. Herrmann repousse le systématisme de cette pratique et son aspect artificiel. En ça, il montre que l’évidence n’a pas besoin d’être soulignée. Une bonne scène, bien amenée, bien réalisée, se suffit à elle même.

Autre aspect institutionnel de la musique de film dont Herrmann s’absout : Le Mickey-mousing, technique qui consiste à synchroniser le rythme de la musique avec l’action et de souligner chaque événement et leur occurrence avec la bande son du film.

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Le compositeur évite aussi la sur-utilisation du thème musical du film comme cela est de coutume à Hollywood. Il ose plusieurs styles harmoniques, alterne entre l’utilisation de dissonances (déjà une innovation en soi) et de consonances, ce qui n’est pas dans les us de l’époque et permet à la musique d’Herrmann de s’extraire la plupart du temps des clichés. Vertigo ou plus tard Psycho en sont des exemples d’écoles.

De nombreux thèmes jalonnent le film comme celui de la Habañera (danse d’origine espagnole dont le tempo est utilisé dans le Carmen de Bizet) : un thème repris plusieurs fois, avec de nombreuses variations, et qui est associé au spectre de Carlotta Valdez, personnage qui hante Madeleine.

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Quant au “Love Theme”, élégie à l’amour, à la vie, à la mort, il est construit d’après un motif de Tristan et Ysolde (thème du “Liebestod”), célèbre opéra de Richard Wagner.

La partition de Sueurs froides est écrite entre le 3 janvier et le 19 février 1958, deux semaines après la fin du tournage. Fin février, Herrmann est enfin prêt à rendre sa copie.

Il ne reste plus qu’à finaliser le travail d’orchestration et à trouver un nouveau directeur musical, digne de ce nom, susceptible de donner toute sa force et son talent à cette partition extrêmement complexe et dense, créée pour un grand orchestre symphonique.

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En raison de grèves de musiciens à Los Angeles, les enregistrements devront s’effectuer à Londres et à Vienne avec un orchestre dirigé par Muir Mathieson, empêchant Bernard Herrmann de diriger son orchestre pour les enregistrements.

La bande originale de Vertigo est considérée par Herrmann lui-même dans son ensemble comme sa meilleure musique de film et par beaucoup comme un chef-d’œuvre de la musique.

C’est Herrmann qui fit découvrir à Hitchcock la véritable importance de la musique dans le processus de création d’un film. Et il fallu attendre Sueurs froides, leur quatrième collaboration, pour qu’Hitchcock prenne véritablement conscience de l’impact émotionnel que provoquait la musique sur les spectateurs.

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Hitchcock offre à Herrmann la possibilité de composer une musique à la hauteur de ses ambitions : il dispose de longues plages sans dialogues au cours desquelles sa musique est réellement mise en valeur.

Paradoxalement, la fascination du réalisateur pour le compositeur de génie fit place à un sentiment de défiance entre les deux hommes, ce qui occasionna une séparation inéluctable quelques années plus tard.

Source : www.cinezik.org – www.nytimes.com – http://lecranmusical.blogspot.com – notes pochette

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CREDITS :

Enregistré en février 1958 à Londres et Vienne – Mercury Records

Artwork [Cover Art] – Saul Bass
Composed By – Bernard Herrmann
Conductor – Muir Mathieson
Management [Executive In Charge Of Music For Universal Pictures] – Harry Garfield
Mastered By – Joe Gastwirt, Ramon Breton*
Reissue Producer – Robert Townson

Cet article a 3 commentaires

  1. Anonyme

    Super comme chronique

  2. Anonyme

    Oui, merci, très instructif.

  3. claire

    il y a des moments où on croirait entendre du Wagner ,l’ouverture de Tristan et Isolde ,c’est troublant ……

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