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Quand sort l’album Headless Heroes Of The Apocalypse en 1971, Eugene McDaniels est un homme dont les plus grandes heures de gloire sont derrière lui. Un temps oublié, ce brûlot de soul engagée sera, une fois de plus, exhumé grâce à quelques grands noms du rap des 90’s pour devenir un objet culte avec des titres comme Headless Heroes, Supermarket Blues ou Jagger the Dagger. La légende veut même que l’administration de Nixon ait appelé Atlantic Records pour se plaindre des paroles incendiaires de l’album.

Fils d’un prédicateur de Kansas City (son père est pasteur) dans les années 1930, Eugene McDaniels a grandi en chantant dans des chorales, en formant son propre groupe de gospel puis en fréquentant le conservatoire de musique d’Omaha (Nebraska). C’est par le gospel qu’il acquiert le timbre souple qui le caractérise, mais il s’intéresse aussi au jazz, apprenant la trompette et le saxophone, se produisant même dans les clubs locaux. En 1961, il place deux titres dans le top 5 des charts, puis va progressivement s’imposer comme compositeur.

Le chanteur décroche plusieurs tubes dans les années 60 et 70 – « A Hundred Pounds of Clay », « Tower of Strength », « Chip Chip ». Malheureusement plus populaire lorsque ses compositions sont revisitées par autrui… Passant du jazz au blues, de la soul au gospel, McDaniels offre un éclectisme dont le sommet fut sans doute son chef d’œuvre engagé Compared To What dont la version enregistrée en live au Festival de Montreux en 1969 par le chanteur et pianiste Les McCann et le saxophoniste Eddie Harris demeure la plus puissante.

Après un séjour en Scandinavie, il se consacre à une forme d’écriture plus engagée (il a quitté les États-Unis très marqué par l’assassinat de Martin Luther King) en embrassant plusieurs styles (jazz, soul, blues, R&B).

Lorsqu’il revient aux États-Unis en 1970, il se présente sous le nom d’Eugene McDaniels et sa musique prend une nouvelle direction. En tant qu’auteur-compositeur, McDaniels embrasse la contre-culture de l’époque. Son album Outlaw (1970) parle déjà de race, de classe et de division culturelle dans un style articulé et théâtral.

Eugene McDaniels Headless Heroes Of The Apocalypse

Sur Headless Heroes of the Apocalypse, McDaniels avertit que les luttes des hommes les uns contre les autres sont inutiles, car une force sombre et sinistre nous contrôle tous (« Headless Heroes »), et que protester sans agir est futile (« aucune danse ne nous rendra libres », chante-t-il dans « Freedom Death Dance »).

La section rythmique comprend Gary King (Idris Muhammad, George Benson) à la basse électrique, ainsi que les membres de Weather Report Miroslav Vitous à la contrebasse et Alphonse Mouzon à la batterie.

Jagger the Dagger – une chanson que beaucoup ont pensé être un coup de gueule contre le pillage musical de Mick Jagger, mais peut-être aussi un affront au magazine Rolling Stone en guise de rétribution pour une mauvaise critique d’Outlaw.

Avec un humour pince-sans-rire, il raconte un épisode de brutalité raciste quotidienne dans « Supermarket Blues », et trouve des plaisirs charnels simples dans « Susan Jane », une chanson acoustique aux accents folk.

Eugene McDaniels Headless Heroes Of The Apocalypse

L’époque lui inspire également « Lovin’ Man », une chanson sur un Jésus extrêmement mortel, un « chercheur de sensualité » dont le message d’amour spirituel et physique pourrait lui attirer des ennuis avec « les cochons ».

« The Parasite (for Buffy) » (Sainte-Marie ?), est un hommage de dix minutes aux Amérindiens qui fini en crise de nerfs : McDaniels se met à hurler d’horreur devant leur sort.

Lorsque Headless Heroes of the Apocalypse sort en 1971, la légende veut que l’administration de Richard Nixon ait elle-même appelé Atlantic Records pour se plaindre des paroles incendiaires de l’album. Les efforts de promotion se sont taris et l’album deviendra l’une de ces perles introuvables de l’ère funk.

Il faudra attendre l’aube des années 1990, pour que Headless Heroes Of The Apocalypse soit redécouvert et samplé à gogo par de nombreux groupes de rap : A Tribe Called Quest, les Beatnuts, Quasimoto, Organized Konfusion, Pete Rock & CL Smooth, Gravediggaz et De La Soul, Beastie Boys.

CREDITS :

Enregistré en 1971 aux Regent Sound Studio, NYC; Atlantic Recording Studio, NYC – Atlantic Records

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