Après avoir livré son Soul Makossa en 1972, Manu Dibango enregistre cette même année un autre monstre musical : Africadelic. Mis en boîte en une semaine pour servir de fond sonore à des émissions de télé françaises en demande de son afro-urbain, le sens et la puissance du groove du Camerounais se chargent pourtant d’en faire autre chose qu’un simple album de commande. Paru en 1975, l’album jette des ponts entre les percussions africaines d’Olatunji et le groove hypnotique de James Brown.
En 1972, c’est la face b d’un 45 tours qui fait le tour du monde : « Soul Makossa », plus gros tube continental de tous les temps, offre l’Afrique au monde occidental, et leurs origines aux musiciens afro-américains. Issu d’une danse traditionnelle – le douala – le makossa reste la musique emblématique des trottoirs des grandes villes camerounaises. Accolée au terme de soul, la danse aspire à l’universel : elle y parvient. Pour mémoire, la face a de ce disque mythique n’est autre que l’hymne de la huitième Coupe d’Afrique des Nations…
Manu Dibango Africadelic
Après avoir livré son Soul Makossa en 1972, Manu Dibango enregistre cette même année un autre monstre musical : Africadelic.
En réponse à une commande de sons afro-urbains destinés à la télévision française et aux radios en recherche de musiques d’illustration pour leurs émissions, Manu Dibango entre en studio chez Mondiaphone, le label de librairie musicale de Louis Delacour.
Se pliant volontiers à l’exercice de la composition pour l’image, le musicien enregistre dans des conditions rocambolesques les titres qui deviendront Africadelic, sans soupçonner le devenir et les futurs succès que rencontreront ces deux albums.
Ça, ce sont les trucs que je faisais en 1972 justement… A l’époque, on avait besoin de musique d’ambiance, il n’y avait pas d’instrumentaux rythmés. Il y avait Paul Mauriat, les machins à la trompette d’or, mais ça manquait de piment. Alors j’ai fait deux ou trois disques comme ça, “African Voodoo”, “Africadelic”, pour les radios, pour la télé, quand il y avait un reportage et qu’il fallait une musique d’illustration “africaine”, ou autre… Ces albums n’étaient pas faits pour le commerce. Mais dans celui-ci, on y entend que des fines lames ! A l’époque on disait que j’étais versatile. Mais moi, j’aime être versatile, au sens américain.
Manu Dibango
Les douze titres instrumentaux mêlent jazz, blues, samba, soul, calypso et biguine. Rencontre de percussions volubiles, de cuivres bouillonnants, de guitares électriques et de nappes d’orgues.
Pour ces sessions, Manu est notamment accompagné par le tromboniste Jacques Bolognesi, Slim Pezin, l’un des guitaristes de la variété française le plus réclamé, le trompettiste Ivan Julien – qu’on a connu derrière Johnny Hallyday – et le saxophoniste François Jeanneau, qui peut évaluer le chemin parcouru depuis le groupe Triangle.
Africadelic fonctionne comme un brouet d’influences afro-cubaines, africaines et américaines, en adéquation totale avec l’époque, à l’image de guitares ouvertement inspirées par Shaft d’Isaac Hayes sur le bien nommé « Wa Wa ». La batterie robotique et la basse ondulante, les breaks inopinés, les effets d’échos, les explosions de cuivres et les roulements de percussions annoncent d’une certaine manière la modernité du disco.
Sur Cold Sweat, vous savez d’où vient le motif de cuivres ? D’un morceau de Miles Davis. C’est ça, le lien entre le jazz, l’Afrique, et le funk : passer du ternaire au binaire. On change un bout de phrase, et c’est parti ! Je suis content qu’ils ressortent ces trucs-là aujourd’hui – il n’est jamais trop tard… On a toujours l’impression qu’on n’a rien foutu, mais en réalité on a fait beaucoup ici. Oui, j’estime qu’on a fait beaucoup…
Manu Dibango
Réédité par le label Hy & Fly, Manu Dibango Africadelic est de ces albums auxquels le sampling a conféré une réputation de graal à mesure que les exemplaires en circulation se raréfiaient augmentant par la même considérablement leur cote.
Sources : www.allformusic.fr – https://allerlei2013riffmaster.wordpress.com – www.diggersfactory.com – www.wegofunk.com – www.liberation.fr – www.music-story.com
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CREDITS :
Enregistré en 1972 au Pathé-Marconi studio Paris – AMI Records
- Featuring – Manu Dibango And His African Pop Group
- Written-By – L. Delacour*, Manu Dibango
- Composed By, Conductor – Manu Dibango
- Engineer – Alain Butet
- Engineer [Assistant] – A. R. Bourdet
- Producer [Artistic Direction] – Louis Delacour