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Au panthéon des pianistes électriques de jazz 70’s, Lonnie Liston Smith figure juste derrière Herbie Hancock, Joe Zawinul et Chick Corea. La série d’albums qu’il enregistrera pour le label Flying Dutchman avec sa formation, les Cosmic Echoes, connaitra une popularité considérable. Entre groove cosmique et jazz fusion nimbée de spiritualité, Expansions, sorti en 1975, propulse le génial clavier dans la cour des Grands Leaders.

Lonnie Liston Smith commence sa carrière à Baltimore aux côtés de chanteuses telles que Betty Carter ou les Supremes. Son camarade d’Université n’était pas moins qu’un certain Gary Bartz. Et c’est par l’intermédiaire d’un autre de ses amis (Mickey Bass) qu’il intègre les Jazz Messengers d’Art Blakey. Après un an aux côtés de Max Roach, il passe deux ans avec Rahsaan Roland Kirk (avec qui il enregistre Don’t You Cry, Beautifull Edith et Here Comes The Whisttleman ).

En 1968, c’est Pharoah Sanders qui le demande. Lonnie Liston Smith découvre le Fender Rhodes, instrument qui va devenir sa marque de fabrique, presque par accident lors d’une session d’enregistrement de 1970.

Sur Thembi, c’était la première fois que je touchais un piano électrique Fender Rhodes. Nous sommes arrivés au studio en Californie – Cecil McBee a dû déballer sa basse, le batteur son kit, Pharoah ses cuivres. Tout le monde avait quelque chose à faire sauf moi. J’ai vu cet instrument dans un coin et j’ai demandé à l’ingénieur : « Qu’est-ce que c’est ? » Il a répondu : « C’est un piano électrique Fender Rhodes. Je n’avais rien à faire, alors j’ai commencé à le tripoter, voir les sons que je pouvais en tirer. J’ai commencé à écrire un thème et tout le monde s’est précipité pour dire : « Qu’est-ce que c’est ? ». Et j’ai dit, ‘Je ne sais pas, je m’amuse juste un peu.’ Pharoah a dit, ‘Mec, il faut qu’on enregistre ça. Comment tu vas l’appeler ? J’avais étudié les projections astrales et on avait l’impression de flotter dans l’espace, alors j’ai dit qu’on allait l’appeler ‘Astral Travelling’. C’est comme ça que j’ai découvert le piano électrique.

Lonnie Liston Smith

Avec Sanders, il grave quelques-uns des plus beaux albums du saxophoniste : Thembi, Upper Egypt, Karma, Creator Has a Master Plan , Summun, Bukmun, Umyun et Jewels of Thought.

Lonnie Liston Smith Expansions
Lonnie Liston Smith Expansions

Début 70, Miles Davis vient le chercher pour jouer entre autres sur On The Corner et Big Fun. Puis avec l’argentin Gato Barbieri, il enregistre Fenix et Under Fire pour le compte de Bob Thiele et son label Flying Dutchman. A cette occasion, il se produit avec Ron Carter, Stanley Clarke, Airto, Nana Vasconcelos, Bernard Purdie et John Abercrombie.

Bob Thiele lui offre en 1973 sa première opportunité d’album solo : il forme alors les Cosmic Echoes avec son frère Donald Smith pour Astral Travelling.

Parmi ses musiciens, on retrouve d’anciens de Sanders et de Davis, notamment Cecil McBee, dont les ostinatos à la basse sont la clé du succès d’Expansions, et les percussionnistes Badal Roy, James Mtume et Lawrence Killian. Andrew Cyrille, un ancien élève de Cecil Taylor, y figure également. Si Astral Traveling est instrumental, sur Cosmic Funk et Expansions, Donald, le frère de Smith, rejoint le groupe à la flûte et au chant.

Avec les Cosmic Echoes, sa musique se teinte d’un psychédélisme très en vogue au cours des 70’s. Piano électrique, lointaines volutes de flute et saxophones, avec des percussions dans tous les coins (congas, clochettes…) et la voix envoûtante de Donald Smith – le frère.

Lonnie Liston Smith Expansions
Lonnie Liston Smith Expansions

En 1975, la formation grave Expansions, sept compositions (six de Smith), et une reprise du classique « Peace » d’Horace Silver.

Le groupe comprend le bassiste Cecil McBee, le saxophoniste soprano David Hubbard, le saxophoniste ténor Donald Smith (qui joue aussi de la flûte), le batteur Art Gore et les percussionnistes Lawrence Killian, Michael Carvin et Leopoldo.

Smith, à la fois sur piano et claviers électriques garde ses compositions du côté jazzy – un jeu léger, ouvert et plein de groove qui tombe parfois du côté funk de la barrière. D’humeur estivale et décontractée, aérée et libre avec ses rythmes enlevés et ses nappes de piano stellaires, Expansions préfigure un certain nombre de grands noms du « smooth jazz », le lissage de studio et le manque d’imagination en moins.

Lonnie Liston Smith Expansions
Lonnie Liston Smith Expansions

Le disque s’ouvre sur le titre éponyme, avec l’une des deux voix de Donald Smith sur le LP (l’autre est celle de Silver). C’est le typique « peace and love and we’ve got to work together » du milieu des années 70, mais c’est rendu avec âme et profondeur sans artifice. La musique de Smith a toujours eu une dimension profondément spirituelle.

Je voulais divertir, mais je voulais divertir le côté spirituel qui est en nous. Les gens parlaient de « tempête tranquille », mais dans cette « tempête tranquille », il y a la même énergie que dans une « tempête sauvage ». C’est comme ça que j’ai voulu aborder l’album, comme une tempête calme, subtile. Je ne vais pas jouer cent mille notes en même temps. La musique a ce pouvoir. Je voulais que chaque auditeur tire de la musique exactement ce dont il a besoin pour rendre sa vie meilleur.

Lonnie Liston Smith

« Desert Nights » reprend le groove d’un piano jazz de Detroit et le recouvre de flûte et de percussions, ce qui le rend irrésistiblement sensuel et soyeux. Elle est étoffée jusqu’au point d’éclatement par le piano de Smith ; il joue un solo luxuriant pour le pont et le remplit à ras bord de tonalités luxuriantes provenant du registre médian.

Lonnie Liston Smith Expansions
Lonnie Liston Smith Expansions

« Summer Days » et « Voodoo Woman » sont les deux titres où les claviers électriques font leur première apparition, mais uniquement en tant qu’instruments capables d’amener le groove à la mélodie rapidement, discrètement, et avec une grâce glissante qui est contagieuse.

Expansions propulse le génial clavier dans la cour des Grands Leaders. La force de cet album tient dans le subtile mélange de jazz, d’ambiances paisibles et de groove. Contrairement à ses pairs dont les disques n’étaient plus du meilleur goût (le jazz-fusion étant devenu une manne pour les maisons de disques), Lonnie Liston Smith s’efforce de garder la fraîcheur et l’énergie inhérente à cette musique.

Référence en matière de jazz soul fusion, son œuvre a inspiré Jay-Z ou Mary J. Blige et a été notamment samplé par les rappeurs Stetsasonic sur Talking All That Jazz.

Il enchaînera les enregistrements pour Flying Dutchman et RCA: Visions of a New World, Reflections of a Golden Dream, Live et Renaissance. En 1977, il signe avec CBS. La couleur musicale sera plus disco-funk, notamment pour les albums Loveland et Exotic Mysteries. En 1979, Donald Smith quitte les Cosmic Echoes et est remplacé par James « Crabbe » Robinson sur A Song for the Children et Love is the Answer.

Les années 80 voient le retour de Lonnie Liston Smith sur le nouveau label de Bob Thiele Doctor Jazz. Son apparition sur l’album de Guru Jazzmatazz Vol 1 dans les années 90 lui permettra de revenir sur le devant de la scène ; il signe alors un nouvel opus (Transformation) en 1998 dans la lignée de ses premiers albums.

Sources : http://www.jimnewsom.com – www.allmusic.com – www.lonnielistonsmith.com – www.allaboutjazz.com – www.funkmysoul.gr – www.cafoutch.fr – www.qobuz.com

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CREDITS :

Enregistré les 25-26 novembre 1974 à New York – Flying Dutchman

Cette publication a un commentaire

  1. jean pierre D

    émouvant et beau du néo classique contemporain

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