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Bill Evans et Stan Getz, deux des improvisateurs les plus lyriques du jazz post-bebop, n’ont presque jamais enregistré ensemble. Leur seule collaboration en studio, pour Verve en 1964, a été si infructueuse, du moins dans leur esprit, qu’ils ont contractuellement demandé à leur maison de disque de ne pas sortir l’album (Il a quand même été publié en 1973 sous le nom de « Stan Getz & Bill Evans »).

En 1974, soit dix ans plus tard, Stan Getz Bill Evans se produisent à nouveau ensemble lors de concerts aux Pays-Bas et en Belgique. Le résultat, cette fois-ci, est bien meilleurs. Le seul autre enregistrement du duo dresse un portrait fascinant de deux jazzmen extraordinaires. Mais comme l’album Verve, il est parfois teinté de frictions.


Stan Getz Bill Evans

Getz s’accorde presque parfaitement avec le trio d’Evans (avec le bassiste Eddie Gómez et le batteur Marty Morell), avec un seul point sensible : Getz a ignoré la demande du pianiste de ne pas jouer le « Stan’s Blues » sous-répété, ce qui a poussé Evans à abandonner rapidement et à faire signe à ses acolytes d’éviter leurs propres solos.

Getz fait alors ce qui semble être un geste musical d’excuse en offrant spontanément un début impromptu de « Happy Birthday to You », en célébration du 45e anniversaire d’Evans, au début de « You and the Night and the Music ».

Mais il y a aussi une différence importante avec l’album studio. Dans ce cas, la parade et le combat musical qui ont lieu entre les deux est plus intrigant que distrayant, en partie parce qu’il provoque un jeu extrêmement riche de la part des deux musiciens.

Stan Getz Bill Evans
Stan Getz Bill Evans trio

Le solo d’Evans sur « Funkallero » par exemple et le rendu chaleureusement conversationnel, mais jamais effusif, de « Emily », de Getz. Sur l’un des titres, un duo Getz-Evans, « The Peacocks » de Jimmy Rowles, une lecture atmosphérique que l’on peut décrire comme une performance de jazz classique.

D’autres titres ne fonctionnent pas aussi bien. Getz a souvent éprouvé de l’agacement vis à vis de l’image du joueur cool qui lui colle à la peau. Souvent, sans doute dans le but de démontrer ses qualités les plus audacieuses, il a poussé son improvisation au-delà de ses propres limites. Le résultat, un son agressif dans les aigus qui jaillit de sa corne comme un glapissement belligérant.

Bill Evans, à l’inverse, semble quelque peu prudent et trop décontracté dans sa recherche d’un équilibre entre son lyrisme harmonique et le souffle libre de Stan Getz.

Stan Getz Bill Evans

L’art de Getz se situe sur la pente cotonneuse, cet équilibre précaire conquis sur les malversations de la vie et la douleur d’exister. Sa musique est forte et paisible, douloureusement lyrique mais toujours emplie d’une élégance naturelle. Des fées sur son berceau ou quelques suppléments d’âme auront bien fait les choses.

« J’ai réalisé il y a peut-être une vingtaine d’années que j’ai reçu de Dieu un don pour rendre heureux les gens durant une heure ou deux, grâce à ma musique.« 

Ce halo brumeux qui entoure la sonorité ample et chaleureuse de Stan Getz, cette fêlure qui transparaît dans la puissance féline de son jeu en ont ému plus d’un. A l’évidence, le charme agit toujours, plus que jamais. Seules les statues resteront de marbre.

Stan Getz Bill Evans

Ce deuxième disque, composé du Bill Evans Trio (bassiste Eddie Gómez et batteur Marty Morell) et de leur invité Stan Getz lors d’une tournée européenne en 1974, a été conservé dans une chambre forte pendant 22 ans. L’album est considéré comme une « réédition vitale » par le magazine Billboard.

Publié à l’origine par le label de bootleg Jazzdoor avec six sélections d’un concert à Laren, Hollande en 1974, Milestone a acquis les masters pour une sortie officielle et a ajouté quatre morceaux bonus d’un concert à Anvers, Belgique une semaine plus tard.

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CREDITS :

#1, 2, 9, 10: Recorded August 9, 1974 at the Singer Concertzaal, Jazz Festival in Laren, Holland.
Others: Recorded August 16, 1974 at Middelheim in Atwerp, Belgium.

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