• Post category:ALBUM
  • Auteur/autrice de la publication :
  • Temps de lecture :11 min de lecture

Deuxième album du T. Rex du mythique Marc Bolan, Electric Warrior impose le glam rock comme une évidence aux yeux des amateurs de rock sucré. La guitare, sourdement étouffée par une distorsion lourde, percute la voix légère et sensuelle de Marc Bolan, qui semble incarner à lui seul l’idée d’un glamour venu se planter dans le cuir d’un rock à peine remis de la folie des années 60. Le carton de Get it on offre au glam rock naissant, et à toute une génération de rockeurs, un hymne qui change la face de ce genre musical et qui influencera de nombreux musiciens. 

Tout commence en septembre 1967. Tony Visconti, bassiste et producteur new-yorkais, repère, en concert à l’UFO de Londres un drôle de duo folky, Tyrannosaurus Rex, dont le chanteur, un certain Marc Bolan ancien mannequin au look androgyne, fait très forte impression au public présent ce soir-là.

Sous le charme, Visconti décide de collaborer avec le Britannique. Il met un peu d’ordre dans les comptines psychédéliques de Bolan à la fois inspirées par les rockeurs des années 50 et Tolkien. Malgré quelques bonnes productions, la sauce ne prend pas. Après une calamiteuse tournée américaine ou son acolyte Steve Took cramé au LSD à l’idée de verser de l’acide dans les canalisations d’eau, le duo acoustique se sépare fin 1969.


T Rex Electric Warrior

Bolan n’est pas en reste. Il rencontre un nouveau percussionniste Mickey Finn dans un restaurant végétarien et sort en avril 1970 un nouvel album A beards of stars, vite enregistré, plus électrique et varié.

Après le virage musical amorcé par cet album, Marc Bolan décide de passer à la vitesse supérieure. De nouveaux managers prennent l’artiste en main. Il passe électrique, raccourci son nom et surtout, écrit un titre qui lui permet de passer à la télévision.

Ce sera le single « Ride A White Swan ». Toujours avec l’aide de Visconti, Marc Bolan enregistre le single et découvrent une formule nouvelle, à base de riffs croustillants et fuzzy, de rythmiques lourdes et de voix filtrées. Le 45 tours décolle lentement, Bolan est donc invité à la BBC pour jouer son titre dans Top Of The Pops. L’ouragan T. Rex s’abat sur la Grande-Bretagne, (le single est numéro deux pour Noël) et Bolan devient la première star télévisuelle du rock.

T Rex Electric Warrior

Une tournée américaine s’impose. Problème : Bolan et Visconti viennent de jeter les premières bases de l’album T Rex Electric Warrior, enregistrant chez Trident et Advision. L’appel de l’Amérique est plus fort. Comme Led Zeppelin II, l’album « Electric Warrior » sera donc terminé pendant une tournée américaine. En fait, une grosse partie du disque sera complété tandis qu’un nouveau single «hot love» escalade les charts à une vitesse fulgurante.

Le moral du groupe est à son zénith et Visconti part sur la route avec le quatuor. Sa mission : réserver des studios et tenter d’y entraîner T.Rex entre deux concerts. Mickey Finn (percussions), Steve Currie (basse) et Bill Legend (batterie) se prêtent au jeu. Ils donnent des concerts tous les deux jours et sont donc particulièrement rodés. Aucune chanson de T Rex Electric Warrior ne nécessitera plus de six ou sept prises, maximum.

Marc Bolan & T. Rex, trublion Glam Rock
T Rex Electric Warrior

Selon Tony Visconti, « Bolan apprenait aux autres les chansons qu’il venait d’écrire sur une guitare sèche, dans sa chambre d’hôtel, puis on fonçait enregistrer ». Les studios utilisés seront Wally Heider de Los Angeles et Media Sound de New York City.

Au Media Sound,  nous avons enregistré Jeepster et Monolith, et débuté ainsi l’album Electric Warrior. Le studio était énorme avec une grande scène pour enregistrer des musiques de films. Le groupe occupait toute la pièce et on s’est dit que c’était vraiment le pied d’enregistrer à New York. On peut entendre la réverbe naturelle du studio dans l’intro de Jeepster lorsque Marc, qui portait des platform shoes, tape vigoureusement du talon sur le sol. (Tony Visconti)

T Rex Electric Warrior

Tony Visconti appartient à une génération de jeunes hussards du son, bien décidé à faire avancer les choses. Décidant de se mesurer à Geoff Emerick qui enregistre les Beatles, Visconti déploie tout un arsenal créatif de trouvailles soniques, écho, phasing, compressions, filtres, reverbs, guitares à l’envers (« Cosmic Dancer »), et même des bandes en boucles (loop). Des Beatles, il a retenu l’idée des instruments surprenants, classiques s’il le faut.

« Jeepster » bénéficie de deux violoncelles et d’un basson. Sur « Ride A White Swan », Visconti avait placé des cordes. Superstition ? Bolan en demande pour « Mambo Sun » et « Get It On », il en exigera sur pratiquement tous les singles de T. Rex, jusqu’à la fin.

Très inhabituel également, le groupe enregistre en configuration live, avec le batteur au centre du studio. Visconti enregistre des basic tracks puis refait voix et solos avec Bolan à part, dans une attitude de confiance totale. Souvent les voix seront doublées, quant aux guitares, c’est un festival, Bolan en met partout. La vie est belle (« Life’s A Gas »).

T Rex Electric Warrior

Quelques copains viennent aider, notamment Howard Kaylan et Mark Volman, alias Flo & Eddie, alors chanteurs des Mothers Of Invention de Frank Zappa après des débuts remarqués avec les Turtles. Ce sont leurs chœurs impeccables qui donnent la dynamique des chansons.

La voix de Bolan, souvent chevrotante, a grand besoin de ce renfort (« Planet Queen »). Visconti se souvient d’avoir répété « Get it On » autour de la piscine d’un des chanteurs, à Los Angeles, dans Laurel Canyon. Il y avait des orangers dans le jardin, aucun des Anglais n’avait jamais vu un truc pareil. »

Se retrouver à répéter dans cette maison de rêve, près d’une piscine privée, avait un côté surréaliste. Marc était un songwriter prolifique. Il avait un gros cahier d’écolier rempli de textes de chanson et d’accords de guitare. Au début d’un album, il l’ouvrait et quand on avait enregistré assez de morceaux, disons dix-sept, il le refermait. Get It On n’était qu’une chanson parmi la bonne cinquantaine qu’il avait dans son cahier à ce moment-là. La première fois que je l’ai entendue, la veille du jour où nous l’avons enregistrée, j’ai su que c’était un tube. (Tony Visconti)

Procédant par séances de dix heures, Tony Visconti finit par mener à bien son marathon et rentre en Angleterre avec, sous le bras, les bandes d’un disque énorme, colossal, qui va marquer la pop anglaise à tout jamais et faire de Bolan le plus gros vendeur de l’année.

T Rex Electric Warrior

###

ANECDOTES :

Des hommes qui chantent comme des femmes : La principale caractéristique de ce son réside dans la présence de chœurs féminins. Depuis le début de l’aventure T.Rex, ses membres étaient à la recherche de chanteuses noires, ce qui n’étaient pas évident à trouver en Angleterre au début des années 70. Lorsque Flo et Eddie (anciens chanteurs du groupe The Turtles qui participeront aux enregistrements de T.Rex par la suite, entre deux participations aux enregistrements de Frank Zappa) les ont rejoints, le groupe a insisté pour qu’ils imitent des chanteuses noires. Car des hommes qui chantent comme des femmes, voilà bien une des composantes du glam rock.

Le riff bien gras de Get It On : Marc Bolan ne s’en est pas caché, le riff bien gras de « Get It On » est directement inspiré de celui de Little Queenie de Chuck Berry. Si vous tendez l’oreille, vous entendrez même Bolan faire son petit clin d’œil en citant un fragment du texte de Berry, juste avant la fin du titre, au moment du fondu : «And meanwhile, i’m still thinking ».

Sources : https://pitchfork.com – www.discogs.com – https://vinylcollector.store

###

CRÉDITS :

Enregistré entre mars et Juin 1971 – Trident Studios, London; Advision Studios, London; Wally Heider Studios, Los Angeles; Media Sound Studios, New York – Fly Records

Marc Bolan : voix, guitares
Mickey Finn : congas, bongos
Steve Currie : basse
Bill Legend : batterie
Howard Kaylan : choeurs
Mark Volman : choeurs
Rick Wakeman : claviers sur « Get It On »
Ian McDonald : saxophone
Burt Collins : flugelhorn
Tony Visconti : producteur
Roy Thomas Baker : ingénieur du son
George Underwood : photo couv

Laisser un commentaire