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Isaac Hayes Black Moses – Enregistré en 1971 aux Stax studios Tennessee USA – Enterprise records
En 1970, Isaac Hayes n’est pas le Moïse noir annoncé. Par contre, il est déjà le Cecil B. De Mille de la soul. Avec Hot Buttered Soul, il vient de changer les normes du genre, a fait passer la production au super et mis du dolby dans le sound. Depuis, il accumule miracles et disques d’or. La B.O. de Shaft en a fait un homme riche, puissant, paré de chaînes en or, couvert de fourrures et de femmes.

Hayes a d’ores et déjà imposé une apparence immédiatement identifiable, à base d’énormes chaînes en or (à la fois symbole de sa réussite sociale, et des origines de ses ancêtres, esclaves africains), crâne rasé, larges lunettes noires, et vêtements extravagants déclinant paillettes et plumetis. A ce stade de son règne, Stax, son label, n’est plus en mesure de refuser ses caprices. Pas même un projet pharaonique tel que Isaac Hayes Black Moses, double album imposant par les moyens techniques (six ingénieurs du son !) et le caractère épique de son contenu, la plupart des morceaux, véritables rhapsodies soul orchestrale, oscillant entre sept et dix minutes. Jusqu’à l’emballage cruciforme qui explose conventions et budgets.


Isaac Hayes Black Moses

L’esprit général de l’album apparaît pourtant décalé par rapport à sa mise en scène. Loin d’être un album prophétique, au sens où Bob Marley l’entendait, Black Moses est la luxueuse confession d’un homme, profondément ébranlé par un divorce, en quête de rédemption affective.

Hormis deux compositions originales, les chansons sont des adaptations de standards, souvent des ballades comme Close To You des Carpenters, Never Fall In Love Again de Dionne Warwick, où Hayes ouvre les grandes eaux de l’hyper sentimentalité.

Isaac Hayes Black Moses
Isaac Hayes Black Moses

Vocalement, il n’ira jamais plus loin dans le registre sensualité virile. Bande-son idéale pour rallye sexuel, l’album a aussi, par sa démesure, un arrière-goût de film catastrophe. D’ailleurs Hayes sera ruiné, et Stax déposera le bilan cinq ans plus tard.

Black Moses allie les compétences d’Hayes en tant qu’architecte des sons de soul progressive à son talent d’interprète. À l’exception de ses « raps » fluides ambiance boudoir, l’énergie de Hayes dans l’écriture des arrangements prend le pas sur les airs de certains des plus grands auteurs de chansons pop des années 70.

Le magnifique « Never Can Say Goodbye » de Clifton Davis est traité avec amour. La lecture par Hayes de « For the Good Times » de Kris Kristofferson fournit un pendant intrigant à la version du même morceau d’Al Green de 1972.

Isaac Hayes Black Moses
Isaac Hayes Black Moses

Deux chansons de Bacharach-David, « I’ll Never Fall in Love Again » et « Close to You », ne semblent pas du tout déplacées à côté de deux titres de Curtis Mayfield.

En réinventant ces standards par le biais d’arrangements orchestraux luxuriants, Hayes (et son collaborateur Johnny Allen) marque de leur empreinte chaque morceau de façon indélébile.

Isaac était vraiment cool. Il regardait son front, le troisième œil, en essayant de trouver une idée. Boom !!! elle était parfaite. On se souvient rarement de Hayes comme d’un créateur énigmatique et agité, et encore moins comme d’un leader politique. (Willie Hall)

Bien que truffé de reprises, Black Moses est un disque d’Isaac Hayes qui, par sa continuité et son intelligence, est l’un de ses plus abouti.

Isaac Hayes Black Moses
Isaac Hayes Black Moses

La même année, la bande originale du film Shaft de Gordon Parks (archétype de la blaxploitation, courant culturel caractéristique du cinéma américain des années 70 atteint la première place des hit-parades, pour la première fois de l’histoire, à la fois pop, et rhythm and blues.

Même s’il est déçu de ne pas avoir, contrairement à ses attentes, obtenu de rôle dans le film, Hayes est à cette occasion gratifié d’un Oscar, et de trois Grammy Awards. La guitare wah-wah et le rythme irrépressible, caractéristiques du générique, font alors le tour du monde.

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CREDITS :

  • Isaac Hayes – lead and background vocals
  • « Hot », « Buttered », and « Soul »: backing vocals
  • The Bar-Kays, instrumentation: « (They Long to Be) Close to You » and « Going in Circles »
  • Instrumentation on all other tracks by The Isaac Hayes Movement:
    • Piano, vibraphone, organ, electric piano – Isaac Hayes
    • Bass – Ronnie Hudson
    • Bongos, congas – Gary Jones
    • Drums, tambourine – Willie Hall
    • Electric piano – Lester Snell
    • Guitar – Charles « Skip » Pitts
    • Piano – Sidney Kirk
  • Arranged by Isaac Hayes & Johnny Allen, except « (They Long To Be) Close to You » by Isaac Hayes & Dale Warren
  • Engineers: Ron Capone, William Brown, Henry Bush, Eddie Marion, Dave Purple
  • Remix engineers: Ron Capone, Dave Purple and Isaac Hayes

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